DEAUVILLE ASIE 2014 : des noms connus et d’autres moins… mais c’est un plus !

Le festival Deauville Asie n’a pas toujours daigné explorer toutes les contrées du continent. C’est plus que jamais le cas cette année avec 7 nations représentées pour les 8 films en Compétition (et aucune trace du Japon !). Les grands noms, eux, se cachent Hors Compétition : Nakata, Kurosawa, Hong Sangsoo, Tsai Ming-Liang… et même Philippe Muyl.

Cette année, c’est le 16ème Festival du film asiatique de Deauville. A chaque nouvelle édition, le chiffre qui l’accompagne rappelle implicitement en quelle année la manifestation a été créée, et ce que cela implique.

PERFECT BLUE de Satoshi Kon est présenté lors du 1er Festival Deauville Asie en 19991999. La première édition du festival se déroule alors que l’engouement (re)trouvé du public français pour le cinéma asiatique est à son comble. 1999, c’est à mi-parcours d’une période de dix ans environ durant laquelle ressortent dans le désordre les derniers films manqués d’auteurs rapidement devenus cultes : John Woo, Takeshi Kitano, Wong Kar-wai, Hayao Miyazaki mais aussi plus discrètement Kiyoshi Kurosawa ou Shinji Aoyama. Puis, au milieu des années 2000, les semi-échecs voire les flops des «nouveaux films attendus» de WKW (My Blueberry Nights), Park Chan-Wook (Lady Vengeance, Je suis un cyborg) ou Kitano (sa trilogie de la déconstruction/reconstruction) traduisent un désintérêt grandissant pour ce qui ne fut en réalité qu’un effet de mode ; les fermetures de boutiques et sites spécialisés, infos ou marchands, le confirment dans la foulée. Malgré cela, Deauville Asia perdure. Le Lotus d’or a beau récompenser des films effectivement au-dessus du lot, et même supérieurs au tout venant international sur une année de cinéma, tels les remarquables Judge de Liu Jie (2010) et Eternity de Sivaroj Kongsakul (2011), même les meilleurs films ne trouvent plus le chemin des salles pour autant.

Néanmoins, les festivaliers les plus acharnés argueront aisément que tel ou tel trésor caché de festival a tout intérêt à le rester et à ne pas goûter au circuit salles, justement pour préserver l’intérêt de se rendre sur place pour le découvrir. Par ailleurs, le lauréat de 2012 (Querrelles de Morteza Farshbaf) prouve que le rendez-vous normand a changé, qu’il a su faire le deuil de son enthousiasme éphémère pour les seules cinématographies japonaises, coréennes et hongkongaises. Peut-être Deauville s’est-il inspiré de Vesoul ou des Trois continents en osant enfin dire que le cinéma d’Asie englobe aussi le Kazakhstan, le Pakistan, l’Iran ou même Israël. La Compétition 2014 est plus hétéroclite que jamais : elle regroupe des films kazakh, iranien, indonésien, philippin, indien, chinois et deux coréens… mais aucun japonais. Ca change.

HAN GONG-JU de Lee Su-jinLes sélectionneurs ont visiblement fait leurs courses à Busan pour composer cette sélection. Trois des huit films en lice pour le Lotus d’or étaient présentés en Corée en octobre dernier : Han Gong-Ju, Steel Cold Winter et Toilet Blues. Notre envoyé spécial sur place n’avait vraiment aimé que le premier des trois, d’ailleurs. Autre titre fort de la Compétition : No Man’s Land de Hao Ning, qui était il y a quelques semaines à peine à Berlin, où son compatriote Black Coal, Thin Ice de Diao Yinan a remporté l’Ours d’or. De ce point de vue, mauvaise pioche pour Deauville Asie. Ugly, nouveau long-métrage d’Anurag Kashyap (Gangs of Wasseypur) devrait quant à lui permettre de faire oublier la clôture de la section Action Asia.

La seule autre section, désormais : les films Hors Compétition. Avec deux autres découverts à Busan, d’ailleurs : l’animé coréen The Fake de Yeon Sangho, successeur de The King of Pigs, et Le promeneur d’oiseau de Philippe Muyl. Les grands noms sont tous réunis dans cette contre-programmation. Deauville Asie permet donc de prendre des nouvelles de Hong Sangsoo avec Our Sunhi (que l’on aime infiniment moins que le précédent, Haewon et les hommes), de Kiyoshi Kurosawa avec Real (que l’on aime autant que ses précédents et que ses suivants), de Hideo Nakata (avec Monsterz, visible en Première Mondiale et hors d’œuvre d’un hommage au cinéaste) ou encore de Tsai Ming-Liang (qui présente Les chiens errants en avant-première, et reçoit le seconde hommage de l’édition). La troisième personnalité à l’honneur cette année est l’actrice, réalisatrice et productrice srilankaise Malani Fonseka. Encore un choix singulier, tout à l’honneur du «nouveau» festival de Deauville Asie.

Le 16 ème Festival du film asiatique de Deauville se déroule du 5 au 9 mars 2014.

Hendy Bicaise
Hendy Bicaise

Cogère Accreds.fr - écris pour Études, Trois Couleurs, Pop Corn magazine, Slate - supporte Sainté - idolâtre Shyamalan

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