
Newsletter Subscribe
Enter your email address below and subscribe to our newsletter
Dixième édition du Festival de Rome et année du changement : Marco Müller, transfuge de la Mostra en 2012, cède sa place à Antonio Monda et la Compétition disparaît au profit d’un Marché du film mis en place pour déployer la force de frappe du festival.
L’arrêt de la Compétition du Festival de Rome n’a pas bouleversé les cinéphiles. Et pour cause, la plupart ignorent même le nom de la récompense suprême décernée là-bas. Peut-être était-ce une erreur d’ailleurs de l’avoir nommée «Prix Marc Aurèle» plutôt que de lui donner un nom d’objet ou d’animal comme ses concurrents (l’empereur romain en impose pourtant plus que des «palmes» ou une «coquille»). Malgré cette relative confidentialité, les jurés qui se sont succédé, en décernant la distinction au populaire Juno en 2007 aussi bien qu’à Marfa Girl en 2012 ou au formidable TIR l’année suivante, ont toujours su tirer le festival vers le haut. En 2013, le jury présidé par James Gray se distingue encore en décernant le Prix d’interprétation féminine à Scarlett Johansson… pour sa composition exclusivement vocale dans Her. Il faudra donc se souvenir de feue la compétition romaine, alors que le festival amorce un tournant capital.
Existent quand-même un Prix du public et des récompenses dans une section parallèle, en l’occurrence Alice nella città qui rappelle un peu la Generation 14plus de la Berlinale. Mais c’est tout. Pour l’essentiel, Rome a fait le choix de ne plus se positionner en défricheur, de ne plus avoir à s’échiner à présenter des films en Première mondiale à cause et malgré une concurrence agressive à la rentrée ; car il faut pouvoir se démarquer, mais il n’y a probablement pas assez de bons films pour tout le monde. En Europe, la concurrence est celle de Venise et de plus en plus San Sebastian. Preuve en est qu’il est difficile de tirer son épingle du jeu sur cette période mais aussi et surtout en arrivant après Cannes et Locarno, la Mostra 2015 a d’ailleurs été l’une des plus faibles depuis bien des années. Le désir du festival romain de ne plus chercher de films parfaitement neufs et de ne plus proposer de Compétition s’explique par un besoin de viser plus haut que ses concurrents vénitien, suisse et espagnol. Rome propose désormais une sélection sous forme de best-of du moment, auquel s’ajoute un nouveau Marché du film pour lui permettre de distancer San Sebastian (et son Club Industry au pouvoir commercial limité) et de titiller plus encore Venise (qui a ouvert le sien en 2012). La pression de la quête de l’exclusivité en moins, Rome s’intéresse seulement aux films frais et cette proposition qui se dévoile aussi bien par la fenêtre artistique (la sélection) que commerciale (le marché) tend finalement à placer le festival en rival naissant des mastodontes de la rentrée nord-américaine : Toronto, New York et Telluride. C’est sur leurs plates-bandes que Rome veut marcher désormais. Les trois manifestations recyclent Venise et Cannes, et ajoutent des nouveautés hollywoodiennes. Alors Rome fait de même. Mais s’il aurait été dommage que le festival ne soit qu’une reprise européenne de l’un d’eux, il est plus excitant qu’il en soit un agrégateur. Entre autres, la sélection propose les Johnnie To et Zemeckis vus à New York, mais aussi le dernier Sono Sion ou Legend vus à Toronto. En plus de ces films visibles par le public, car la manifestation est accessible à tous, se tient donc son Marché du film ouvert le premier week-end seulement. Le sentiment d’urgence n’ayant jamais fait de mal pour booster des ventes, ce n’est certainement pas une mauvaise idée.
En marge de la sélection, le festival exécute un grand écart entre jeunesse et sagesse. Comme dit précédemment, Alice nella città est une section composée d’une petite trentaine de films tournant tous autour de l’enfance et l’adolescence, et dont l’exhaustivité permet d’y retrouver aussi bien Mustang que Pan, mais aussi le très attendu Le garçon et la bête de Mamoru Hosoda ou l’adorable Le nouveau de Rudi Rosenberg. Les sages, eux, s’écoutent plus qu’ils ne se contemplent à Rome, puisque des Masterclass de Frances McDormand et Joel Coen, William Friedkin et Dario Argento, Todd Haynes (ou encore Paolo Sorrentino pour ceux que ça intéresse) sont aussi organisées pendant le festival.
Retrouvez ici la sélection complète.
La 10ème édition du Festival du cinéma de Rome se déroule du 16 au 24 octobre 2015