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Premier long-métrage d’Asaph Polonsky, présenté à la Semaine de la Critique, One week and a day vient de recevoir le prix d’aide à la diffusion Fondation Gan : l’occasion de revenir sur ce film qui fut effectivement l’une des belles surprises de ce début de festival.
On ne peut pas dire que le pitch faisait rêver : à la fin du Shiv’ah, cette période de sept jours suivant le décès dans la tradition juive, comment se remettent, ou ne se remettent pas, deux quinquagénaires de la mort de leur fils. De quoi redouter un nouveau film sur le deuil comme il s’en voit beaucoup en festival, et la perspective d’un traitement cocasse – tout ce qui semble intéresser le père est de fumer un joint avec le fils du voisin – n’avait rien pour nous rassurer, laissant craindre un objet un peu hypocrite, faussement enjoué alors que rien dans la situation ne s’y prête. Dès les premières minutes, One week and a day lève ces préventions : plus ferme, plus affûté qu’on ne le pensait. Le père, Eyal, enferme ses voisins dans le jardin, leur reprochant leur absence au pire de la crise, sans se départir d’une sorte d’humour pince-sans-rire peu amène révélant une douleur qu’on imagine immense.
Ce n’est pas forcément nouveau, ce refus de l’émotion derrière un cynisme bourru. Ce qui l’est plus est peut-être, d’une certaine manière, le refus du refus. Le scénario aurait pu s’amuser beaucoup plus avec son personnage principal, plaisamment odieux (il engueule à peu près tout le monde, plus ou moins à raison), en faire un anti-héros truculent. S’amuser plus aussi avec cette histoire de joint (un vieux pété, ohoh). Au lieu de quoi, ne recherchant ni le pathos ni le rire systématique (même si l’humour opère indéniablement), il offre finalement peu de prises, ne pouvant que constater que tout est incertain, et branlant, ce qui était probablement la solution la plus honnête. Il est difficile de dire, par exemple, si le couple des parents est prêt à rompre, ou profondément soudé sous une certaine rudesse. Difficile de dire aussi si la défunte destinée à occuper la concession voisine de celle du fils est aussi admirable, aussi solide que dans le portrait qui nous en est fait. Je suis heureux qu’ils soient à côté, dit en substance Eyal au frère de la défunte, comme s’il avait enfin cette chose à laquelle se raccrocher. « Elle le protégera ». « Ou l’inverse », marmonne l’autre, plus incertain semble-t-il que dix minutes plus tôt dans son éloge funèbre. Et l’angoisse revient http://rusbankinfo.ru/credits.html.
Là où le film passionne, c’est dans sa manière de souligner le caractère indispensable des échappatoires. Cette histoire de joint n’est pas le cœur du film, ou un cœur ponctuel. Pas non plus un prétexte, parce que le temps de quelques heures, voire quelques jours, il s’agit effectivement de l’unique objectif qui paraisse à Eyal valoir le coup d’être poursuivi sérieusement. Mais bientôt, un autre but, guère moins dérisoire, viendra s’y substituer, puis encore un autre. A un moment, le film se décentre, de manière étonnante (c’est sans doute sa plus grande qualité, cette faculté de nous refuser le passage attendu : en guise de scène de défonce, un homme qui joue avec deux chatons puis se couche en chien de fusil au côté de sa femme ; la vidéo de deux enfants, le fils décédé et celui du voisin, chantant You can call me Al de Paul Simon ? on ne la verra pas), pour se consacrer au deuil d’un autre homme. On le voit notamment, comiquement, mettre toute son énergie à laver sa voiture salie par un caca d’oiseau, sans résultat, manière peut-être un peu explicite de la part du cinéaste de souligner l’importance de ces petits buts qu’on se fixe et qui seuls permettent de tenir. Le dire n’est rien, le constat psychologique est banal. Ce qui l’est moins, c’est d’avoir imaginé un film qui, par son rythme, épouse ce mouvement-là.
ONE WEEK AND A DAY (Israël, 2016), un film d’Asaph Polonsky. Avec Shai Avivi, Evgenia Dodina, Tomer Kapon, Sharon Alexander , Uri Gvariel, Carmit Mesilati-Kaplan, Alona Shauloff. Durée : 98 minutes. Sortie en France indéterminée.