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Avec cette relecture de Blade Runner, le réalisateur espagnol Ion de Sosa met en scène un monde futuriste et dépeuplé pour s’interroger sur ce qui définit l’être humain et le différencie de sa parfaite imitation.
Androids Dream se déroule en 2052 et s’ouvre sur une succession de longs plans fixes d’une ville espagnole dépourvue d’animation. Les séquences s’enchaînent dans un silence quasi complet, à peine perturbé par le bruit de quelques rares habitants. La caméra fait ensuite un bond à l’intérieur d’appartements pas vraiment chaleureux : des intérieurs froids, des bâtiments vides, des chantiers avec des câbles qui dépassent, des murs vierges, un autre mur vierge – mais avec une prise électrique à droite -, un autre mur à peine plus défraîchi… Ces plans sont récurrents tout au long du film, dépeignant une vacuité futuriste froide et impersonnelle.
À ces plans immobiles succède une série de meurtre, filmée de manière très neutre dans des plans-séquences silencieux. On y voit des habitants, seuls ou à deux, tenter d’échapper à un tueur, avant de se prendre une balle. Cette ville désertique se révèle alors menaçante, au point que les lasers naviguant sur les couples de danseurs le soir en deviennent inquiétants, comme à la recherche de cibles. Mais ces effets lumineux paraissent également les transporter dans la galaxie lorsqu’ils se réverbèrent comme des étoiles sur leurs visages.
Les fictions futuristes anticipent souvent une conquête de l’espace : Androids Dream n’échappe pas à la règle. Il est en effet question de vaisseaux spatiaux même si l’on ne voit pas plus qu’un avion, le film entier étant uniquement composé d’objets et de décors contemporains. Les animaux se raréfient et semblent proches de la disparition, ce qui fait leur valeur. On voit un mouton mort, des chiens enfermés aboyer dans le vide, un petit oiseau à la recherche d’une issue se prendre une vitre à plusieurs reprises. Les chansons, aussi importantes que les dialogues, abordent les principaux thèmes du film : la mort et le vide. Dans certaines paroles, il est question de « vide intérieur » ou de l’histoire d’un homme qui tua sa femme car il ne voulait pas la partager.
Les androïdes du titre sont bien présents, mais pour qui n’aurait ni vu ni lu Blade Runner, ils sont difficiles à distinguer des humains. Ceux-ci semblent en tout point similaires aux humains ; ils saignent lorsqu’ils sont blessés, s’essoufflent en courant, font des rêves, s’aiment et peuvent même être parents. Ion de Sosa s’interroge ainsi sur ce qui définit l’être humain et à partir de quel point de perfectionnement un androïde devient son équivalent.
Lucie Goulard
ANDROIDS DREAM/SUEÑAN LOS ANDROIDES (Espagne, 2015), un film de Ion de Sosa, avec Manolo Marin, Moisés Richart, Marta Bassols. Durée : 61 minutes. Sortie en France indéterminée.