LA JAURIA et WAR PONY : espoirs décus

Deux premiers films traités ensemble, car souffrant d’un mal commun qui vient annuler les belles promesses initiales. L’un comme l’autre posent dans leur premier acte quantité d’éléments prometteurs. Côté américain (War Pony), une réserve indienne filmée crûment pour ce qu’elle est, un coin de tiers-monde au cœur des USA, où l’argent est donc forcément le nerf de la guerre ; et là, deux jeunes destins masculins et pourtant bien trop aguerris à l’exercice qui se croisent, un garçon qui sort de l’adolescence en étant déjà père, un autre qui y entre tel le « petit frère qui veut grandir trop vite » du morceau d’IAM. Côté colombien (La Jauria), un meurtre traité par un cut brutal de montage qui exprime toute la violence du geste ; un onirisme à la lisière du cadre, que la mise en scène et la musique font sentir comme étant à portée de main (surtout lors d’une reconstitution policière dans une grotte d’où le cadavre a disparu) ; un camp de rééducation pour jeunes délinquants au cœur de la jungle, et cinématographiquement quelque part entre Full Metal Jacket et Apocalypse Now.

Mais ce camp où sont enfermés les enfants « mal nacidos », mal nés (qui rappellent les enfants-soldats d’un autre film colombien, Monos), devient une prison pour le film lui-même, où celui-ci s’enferre dans un faux rythme où rien ne progresse véritablement. Les personnages sont magnétiques, la société baroque et dangereuse qu’ils constituent est perturbante, mais tout cela reste à l’état embryonnaire, rien n’est véritablement creusé, de même que les enjeux qui finissent par être résolus sans jamais avoir été développés au-delà de leur exposition.

Même dynamique délétère dans War Pony: ses atouts formels, la puissance de sa mise en scène, l’énergie de son montage, la justesse de l’interprétation, sont peu à peu éclipsés par le surplace de son récit, qui ne sait que faire des dilemmes moraux de ses protagonistes, du tragique du déterminisme social qui leur est imposé, des thématiques collectives conséquentes vers lesquelles cela devrait ouvrir. De fugaces apparitions semi-oniriques sont censées faire office de réponses fuyantes, tandis que le scénario surcompense maladroitement le manque de fond par une accumulation de malheurs artificiellement infligés aux personnages.

LA JAURIA (Colombie, 2022), un film de Andres Ramireez Pulido, avec Jhojan Estiven Jimenez, Maicol Andres Jimenez. Durée : 86 minutes. Sortie en France indéterminée.

WAR PONY (Etats-Unis, 2022), un film de Riley Keough & Gina Gammell, avec Jojo Bapteise Whiting, Ladainian Crazy Thunder. Durée : 115 minutes. Sortie en France indéterminée.

Erwan Desbois
Erwan Desbois

Je vois des films. J'écris dessus. Je revois des films. Je parle aussi de sport en général et du PSG en particulier.

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