DRUNK, l’alcool comme seul moteur

Quatre hommes dont les vies ont été arbitrairement définies par le scénario comme ennuyeuses à mourir, espèrent de manière tout aussi arbitraire faire de l’alcool la réponse à leur crise de la quarantaine. Deux heures plus tard, la morale qui tombe va vous stupéfier : l’alcoolisme, c’est dangereux et peu fiable pour combler le vide et les difficultés de l’existence.

À travers ses personnages, le film de Thomas Vinterberg ne raconte rien d’autre que lui-même et sa grande pauvreté : l’alcool est autant sa béquille que la leur. Son unique carburant comique (et presque deux heures de blagues laborieuses sur le décalage ou le ridicule provoqués par l’ébriété, c’est long), et tragique – rehaussé d’une touche de misogynie latente, les femmes n’étant ici présentes qu’à travers leurs conflits avec leurs maris. Quand Drunk assène avec solennité, au bout d’une heure et demie, que la consommation massive et régulière d’alcool peut provoquer l’alcoolisme, on aimerait croire que l’on a affaire à un canular (même espoir un peu plus tôt, face à un montage YouTube totalement hors sujet d’images de politiques ivres, composé pour moitié d’images du seul Boris Eltsine) et non à un drame à prendre au premier degré, sérieux et dénué de toutes nuances, tristement binaire en toutes choses.

On aimerait croire que l’on a affaire à un canular et non à un drame à prendre au premier degré, tristement binaire

A plusieurs reprises, les quatre protagonistes en appellent à d’illustres hommes de lettres ou de musique, alcooliques notoires ayant réalisé de grandes choses, pour légitimer leur démarche de se réinventer par la beuverie. Mais les individus qu’ils prennent pour modèles n’avaient pas que l’alcool, ils avaient aussi du talent, source essentielle de leurs accomplissements. A part celui de fermer les yeux sur leurs bassesses et leurs dérobades, les héros de Drunk ne démontrent pas de réel talent d’un bout à l’autre du film. Et là encore, un parallèle entre eux et leur auteur derrière la caméra se fait jour ; surtout au vu du final désinvolte, maigre pirouette qui cherche à nous faire oublier la faiblesse de la réflexion par un numéro de danse de Mads Mikkelsen.

DRUNK (Druk, Danemark, 2020), un film de Thomas Vinterberg, avec Mads Mikkelsen, Thomas Bo Larsen, Lars Ranthe, Magnus Millang. Durée : 115 minutes. Sortie en France le 14 octobre 2020.

Erwan Desbois
Erwan Desbois

Je vois des films. J'écris dessus. Je revois des films. Je parle aussi de sport en général et du PSG en particulier.

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