OUVERT LA NUIT : l’ego trip un peu léger d’Edouard Baer

A la veille de la première de la pièce la plus prometteuse de la saison, rien n’est prêt au Théâtre de l’Étoile. Durant toute la nuit, son directeur erre dans les rues de Paris avec sa stagiaire, à la recherche de solutions… Indéniablement drôle, Ouvert la nuit se contente malheureusement de jouer sur le magnétisme de son acteur principal et réalisateur, Edouard Baer.

Luigi a la quarantaine, dirige un théâtre, boit et flirte à tout va. Mais à la veille d’une première, tout semble s’effondrer. En une nuit, il doit sauver son théâtre, convaincre ses employés de rester à ses côtés et persuader sa meilleure amie et collègue qu’on peut lui faire confiance.

Ouvert la nuit annonce la couleur dès les premières minutes : c’est un film comique, qui veut faire rire à tout prix. Il est agréable de trouver dans ce genre de films une portée politique, sociale, ou même poétique. Ouvert la nuit ne s’inscrit pas dans cette lignée de productions visant à susciter à la fois rire et réflexion chez le spectateur, et cherche le rire pour le rire. Malheureusement, son humour repose uniquement sur la personnalité et le charme naturel d’Edouard Baer. Le film se réduit à un ego trip un peu facile, allant même jusqu’à effacer Sabrina Ouazani, comparse fascinante et criante de naturel, dont le talent ne demanderait qu’à être mis davantage en valeur.

Les personnages secondaires, justement, servent seulement de ressort comique mais jamais de moteur à l’action. Ils restent caricaturaux et sans grande profondeur : la jeune gothique obsédée par son amant, le vieux rocker aux cheveux longs et blancs, la business woman qui fait passer son travail avant sa famille, le metteur en scène asiatique déterminé et fermé à tout, etc. Le plus dérangeant est sans doute le vendeur de roses, un étranger ambulant. Celui-ci sert de prétexte à des gags à répétition, susceptibles d’amener le public à le mépriser ou à se moquer de son incapacité à s’intégrer (alors qu’il ignore tout simplement les codes de la société dans laquelle il vit). Plus tard dans le film, Edouard Baer se veut fraternel, et passe du registre de la moquerie à celui de la tendresse, en esquissant la possibilité d’une amitié entre ce vendeur ambulant et le personnage de Luigi. Mais ce basculement se fait avec maladresse et ne fonctionne pas, laissant au spectateur la possibilité de croire que tout le monde n’est pas le bienvenu dans la troupe… Pour un film manifestement peu engagé politiquement et qui cherche seulement à faire rire, Ouvert la nuit finit par receler des enseignements douteux.

Louise Marmié

 

OUVERT LA NUIT d'Edouard Baer

Pour son troisième long-métrage, Edouard Baer se met en scène en directeur de théâtre qui enchaîne les péripéties plutôt que de s’en tenir à son but : assurer la première de son nouveau spectacle. Ouvert la nuit a le mérite de décrocher quelques rires mais s’avère lassant.

Dès le début, le réalisateur nous plonge dans l’action grâce à une Audrey Tautou sillonnant un théâtre rempli de personnages iconoclastes, avant de se focaliser sur le héros, Luigi. Ce dernier veut sauver son théâtre mais s’implique peu, préférant profiter de la vie, quitte à agir sans raison. Alors que son établissement est en danger, on le surprend d’emblée en plein ébat avec une jeune femme, caché dans un placard. Le ton est donné : il sera décalé.

Edouard Baer essaie de nous plonger dans cette ambiance à coup de répliques et de situations improbables uniquement là pour faire rire. Toute réalité est écartée. Hormis le personnage incarné par Audrey Tautou, très proche de Luigi et qui rattrape toutes ses erreurs, aucun de ceux qui entourent ce directeur ne semble représentatif de notre société. Ils se situent dans la lignée du film : légers et caricaturaux. Tous ont un trait de personnalité volontairement très accentué qui leur enlève tout sérieux. On les sent envoûtés par Luigi, lui vouant un véritable culte alors que ce dernier ne se soucie guère d’eux.

Edouard Baer, réalisateur, concentre toute l’action sur Edouard Baer, acteur, pour montrer un personnage impossible, déconnecté de la réalité, sans morale, insensible même à la mort. On regarde un auto-portrait très élogieux, trop élogieux d’Edouard Baer, et qui sonne faux. Il est vu comme séduisant, un homme apprécié, décomplexé, qui ne se remet jamais en cause, qui résout tout avec humour… Et pour qui ça marche ! Il peut agir de n’importe quelle façon, il s’en sort toujours. On l’accepte parce que ce sont les règles d’Ouvert la nuit, sauf que Luigi n’existe véritablement qu’au travers des autres personnages qui, eux, tentent d’apporter une matière au film, en vain, puisque ceux-ci n’ont aucune influence sur lui. Et à voir Luigi/Edouard Baer ainsi détaché des personnages qui l’entourent tout en dépendant d’eux, quelque chose sonne faux.

L’acteur-réalisateur tente bien de donner du liant, à coup de clins d’œils, efficaces, certes, mais un temps seulement, avant de devenir lourds. On s’ennuie devant ce qui ressemble à du déjà-vu ; sentiment renforcé par un casting qui n’utilise personne à contre-emploi et amène de nombreux acteurs à jouer leur rôle habituel. Préférant se focaliser sur le chef plutôt que sur sa troupe, Ouvert la nuit ne tient pas la distance.

Enzo Bessega

 

OUVERT LA NUIT (France, 2016), un film de et avec Edouard Baer, avec également Sabrina Ouazani, Audrey Tautou, Gregory Gadebois… Durée : 96 minutes. Sortie en France le 11 janvier 2017.