A SONG SUNG BLUE : le bleu est une couleur douce et triste

Ce premier long-métrage d’une jeune cinéaste chinoise tient pleinement les promesses de la moitié de son titre – non pas la chanson (on est loin de la comédie musicale) mais la couleur bleue, omniprésente à l’écran de la première à la dernière minute sans que cela ne paraisse jamais forcé, artificiel ou de mauvais goût. L’inspiration et le talent graphiques se conjuguent pour donner vie à une palette de mille nuances de bleus ciel et turquoise, sur les vêtements et les décors, dans les teintes et les reflets de la lumière qui nimbe les lieux et les personnages. Le résultat est un ravissement pour nos yeux, un cocon finement ouvragé dans lequel on se love avec bonheur, d’autant plus que la mise en scène fourmille de belles idées de composition.

La délicatesse qui règne sur la forme est aussi de mise dans la narration mais pour un résultat plus mitigé, trop ouaté. Le premier amour estival qui nous est raconté, entre l’adolescente Xian et la jeune adulte Mingmei, l’est d’une manière qui reste trop sur la réserve pour nous remuer autant qu’il le devrait et le pourrait. Zihan Geng est pourtant bien consciente des tumultes déclenchés par les émois amoureux – « l’amour et la rancœur ont en commun de ne jamais disparaître », « à ton âge, en amour comme en haine, ne retiens rien », ainsi qu’elle le fait dire au père de Xian, un des beaux rôles secondaires du récit.

La relation entre les deux héroïnes demeure à l’état d’esquisse, belle mais inaboutie

Mais les actes de A song sung blue sont en contradiction avec ces paroles, en restant trop sages et pudiques à de rares exceptions près, telles les larmes sur lesquelles le film se referme. La relation entre Xian et Mingmei, mi-grisante mi-impossible, mi-réelle mi-fantasmée (son apparence, sa double culture, la manière dont elle surgit dans le film – d’abord sous forme de portrait plus grand que nature – et en disparaît, placent Mingmei à la lisière d’être une vision idéalisée issue des songes de Xian), demeure à l’état d’esquisse, belle mais inaboutie.

A SONG SUNG BLUE (Chine, 2023), un film de Zihan Geng, avec Meijun Zhou, Ziqi Huang, Jing Liang, Long Liang. Durée : 92 minutes. Sortie en France indéterminée.

Erwan Desbois
Erwan Desbois

Je vois des films. J'écris dessus. Je revois des films. Je parle aussi de sport en général et du PSG en particulier.

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