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Une seule prise pour deux vidéos dans les conditions du direct.
Nos lecteurs les plus cocardiers seront contents. En même temps que Michael Cimino venu présenter la version restaurée de La porte du paradis, la France a reçu à Venise un double hommage. Celui d’Alberto Barbera, le directeur artistique de la Mostra, qui a tenu a saluer Thierry Frémaux, son homologue cannois présent dans la salle : l’idée de Venice Classics, nouvelle section dont La porte du paradis est le film d’ouverture, s’inspire évidemment de Cannes Classics dans son désir de valoriser le travail de restauration réalisé sur les films dits du patrimoine. Second hommage, celui de Michael Cimino, estimant le public français comme le plus cinéphile du monde. Les Italiens les plus chauvins de la sala Perla, où se déroulait la projection, ont dû apprécier…
Plus sérieusement, Cimino s’est félicité de l’apport du numérique dans la restauration de La porte du paradis, si précieux qu’il a eu l’impression en redécouvrant les scènes nettoyées d’avoir en fait tourné un film en 3D (vidéos en anglais et en italien).
La beauté graphique s’en trouve accentuée. Les séquences du Heaven’s Gate, cette salle des fêtes où l’on peut danser en patins à roulettes ou s’organiser contre les belliqueux propriétaires terriens, portent mieux leur nom. La lumière diffuse du plafond et la texture ouatée de l’image font ressembler l’endroit à une baraque flottant au milieu des nuages. Plus encore qu’auparavant, l’impressionnisme des couleurs se fait remarquer au sein des décors grandioses. Des couleurs européennes sur un dessin américain : La porte du paradis est le plus européen des westerns plastiquement, mais aussi idéologiquement, par sa célébration d’une âme slave si chère au cinéma de Cimino.
La porte du paradis, version longue (216 minutes, 67 minutes de plus que la version distribué par United Artists aux Etats-Unis), est passé du statut d’œuvre maudite à celui de monument. Michael Cimino a visiblement bonne mémoire, puisqu’il remercie ses acteurs principaux Kris Kristofferson, Christopher Walken et Isabelle Huppert de n’avoir jamais renié ce film. Il remercie surtout sa productrice Joann Carelli de l’avoir soutenu après l’échec cuisant de La porte du paradis (prétexte ayant servi aux propriétaires de United Artists à liquider le studio, mais événement qui a signé le glas symbolique de la toute puissance des réalisateurs du Nouvel Hollywood), et d’avoir insisté auprès de lui pour restaurer l’œuvre. Le ressentiment que La porte du paradis a valu à Cimino pendant trente ans lui avait coupé toute envie de le côtoyer à nouveau. « Etre tristement célèbre, cela n’a rien de drôle ».
A Venise, Michael Cimino a assisté à la projection de son film, comme s’il s’agissait d’une nouvelle première mondiale. La longue standing ovation après presque quatre heures d’un voyage vers l’essence même des Etats-Unis (de ce point de vue, c’est probablement l’égal de Moby Dick en terme d’impact et d’intelligence) a prouvé que cette seconde naissance était la bonne. Etait-ce la réconciliation définitive entre Cimino, silhouette fragile surmontée d’un improbable visage mélangeant Yoko Ono et Willy Wonka, et La porte du paradis ? Cela en avait tout l’air en tous cas.
Cette version longue restaurée numériquement a fait l’objet d’une projection au Festival Lumière 2012 de Lyon. Sortie dans les salles françaises le 27 février 2013.
Une exploitation en DVD et Blu-Ray est à prévoir sous peu, la restauration du film ayant été effectuée sous la houlette de l’éditeur Criterion.