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Après avoir été montré à Venise en marge de la présentation de Gravity en ouverture du festival, et avant de prendre place parmi les suppléments de l’édition Blu-Ray de ce dernier, Aningaaq a été mis sur Internet par la Warner. Chacun peut ainsi désormais découvrir le dialogue de sourds entre Ryan Stone et Aningaaq, depuis le point de vue de celui-ci.
Dans Gravity, l’héroïne Ryan Stone parle par radio avec deux hommes se trouvant sur Terre, et qu’on ne voit donc jamais. Pour l’un d’entre eux, le court-métrage Aningaaq nous donne le contrechamp venant combler ce hors champ. Vous l’aurez compris, il ne s’agit pas du mission control Ed Harris (pour lequel un détournement d’images d’Apollo 13 en y accolant ses répliques de Gravity fera très bien l’affaire) mais de l’Inuit inconnu avec qui Stone a une conversation à cheval entre deux langues, alors qu’elle s’apprête à se laisser mourir dans la capsule Soyouz. À proprement parler, il n’y a pas grand-chose à découvrir dans Aningaaq puisque les paroles échangées sont strictement les mêmes que dans Gravity, où elles permettaient déjà de saisir l’essentiel de ce qui occupe les quelques minutes partagées à distance avec Aningaaq. Un point fait exception, et s’il est notable il n’a toutefois rien d’un twist renversant notre perception des événements. Le programme d’Aningaaq est empreint de la même honnêteté que celui de son grand frère Gravity : offrir un récit linéaire, limpide, sans duperie ni cachotterie. À l’image de son beau travelling d’ouverture qui nous fait faire connaissance avec son héros éponyme, une poignée de secondes avant les premiers grésillements de la voix de Stone dans son poste radio.
La suite déroule, en de sobres plans fixes, le fameux dialogue qui n’a pas vraiment lieu. Chacun ne parle que de soi, et dissout dans son monologue égocentré les rares bribes de ce qu’il déchiffre des dires de l’autre. Cette composition a sa part de cruauté – surtout lorsqu’Aningaaq, occupé à faire risette à son bébé, n’écoute même plus Stone au moment où elle lui demande s’il peut dire une prière pour elle – et d’évidence (les deux langues différentes pour accentuer le fait que les humains ne s’écoutent jamais vraiment entre eux). Mais Aningaaq fait de ces tares potentielles des bases sur lesquelles prendre appui pour s’élever, assez haut. Le court de Jonas Cuaron (fils d’Alfonso, et déjà crédité comme coscénariste de Gravity) est un petit film mais un beau film, car possédant une réelle subtilité dans son propos comme dans la manière de le susurrer. Nous, humains, avons beau être éloignés par notre difficulté à établir de véritables contacts, nous nous retrouvons tout aussi solidement unis par le fait que nous vivons les mêmes grandes expériences – vie et mort, amour et séparation. Comme le dernier plan d’Aningaaq l’indique délicatement, nous sommes tous des étoiles filantes traversant plus ou moins fugitivement les existences de nos semblables.
Découvrez Aningaaq de Jonas Cuaron ici.